Jeunes gens, prenez garde aux choses que vous dites !
Tout peut sortir d'un mot qu'en passant vous perdîtes.
Tout, la haine et le deuil ! Et ne m'objectez pas
Que vos amis sont sûrs et que vous parlez bas.
Ecoutez bien ceci: Tête à tête, en pantoufles,
Portes closes, chez vous, sans un témoin qui souffle,
Vous dites à l'oreille au plus mystérieux
De vos amis de cur, ou, si vous aimez mieux,
Vous murmurez tout seul, croyant presque vous taire,
Dans le fond d'une cave, à trente lieues sous terre,
Un mot désagréable à quelque individu.
Ce mot que vous croyez qu'on n'a pas entendu,
Que vous disiez si bas, dans un lieu sourd et sombre,
Court, à peine lâché, part, bondit, sort de l'ombre ;
Tenez, il est dehors ! Il connaît son chemin ;
Il marche, il a deux pieds, un bâton à la main,
De bons souliers ferrés, un passeport en règle ;
Au besoin, il prendrait des ailes comme l'aigle !
Il vous échappe, il fuit, rien ne l'arrêtera ;
Il suit le quai, franchit la place et cetera,
Passe l'eau sans bateau dans la saison des crues,
Et va, tout à travers un dédale de rues,
Droit chez le citoyen dont vous avez parlé.
Il sait le numéro, l'étage, il a la clé,
Il monte l'escalier, ouvre la porte, passe,
Entre, arrive, et railleur, regardant l'homme en face,
Dit: - « Me voilà ! Je sors de la bouche d'un tel. »
Et c'est fait. Vous avez un ennemi mortel !
Victor Hugo - extrait de Toute la Lyre, recueil posthume publié en 1888 |
| Giovanotti, attenti alle cose che dite!
Da una parola persa per la via, tutto
ne può uscire, lutto e odio, e non mi ribattete
ch'avete sicuri amici, e voi parlate basso.
Sentite questa: testa testa, in ciabatte,
a casa vostra chiusi, senza uno che spifferi,
voi dite all'orecchio d'uno dei vostri amici,
quello più misterioso, oppur, se preferite,
da solo bisbigliate, credendovi tacere,
in fondo a una cantina, a trenta metri sotto,
una parola amara verso qualche soggetto.
Questa parola - pensate - che non è stata udita,
che dicevate piano, in luoghi sordi e scuri,
appena mollata corre, scatta, esce dall'ombra;
ecco, è già fuori! conosce il suo cammino;
marcia, ha due piedi, perfino un bastone in mano,
buone suole ferrate, il passaporto a posto;
se servirà, d'un'aquila lei prenderà le ali!
Vi scappa, fugge, niente l'arresterà;
percorre piazze, segue marciapiedi,
supera senza una barca l'acqua d'un fiume in piena,
e va, va, attraverso un dedalo di strade,
dritto a casa di quello che avete menzionato.
Sa il numero, a che piano, ed ha la chiave,
monta le scale, apre la porta, passa,
entra, arriva e beffarda, guardando l'uomo in faccia,
gli dice: "Eccomi! Esco dalla bocca d'un tale."
Ed è fatta. Avete appena trovato un nemico mortale!
(Trad. G. Cerrai - 2012) |